jeudi 4 août 2011

TOE, Défi au long cours ou sacrifice pédicural ?


Depuis un an je décortique  les « Endurance Mag », « Sciences et Sports »  et  « Cuisine du Sud Ouest »  avec pour objectif secret, une nouvelle technique d’entrainement révolutionnaire.
Habilement nommée la technique Mexicaine (cf. carnet de transpiration), elle consiste à courir peu et à se nourrir d’arachide, de fromage, et de haricots rouges. Les Chorier, Lorblanchet et autres n’ont qu’à bien se tenir! C’est donc frais comme une ablette que je pointe mon corps ultra entrainé.



Accompagné de mes deux amis des Huiles, Jeff et le Squal, la veille nous gagnons le lieu du départ.
Ils sont fiers et leur regard profond en dit long sur leur motivation et leur préparation.
Leurs muscles tendus pourraient trancher un jambon Corse. Ils sont beaux et sereins, je les admire. Ils préparent leurs sacs avec précision et dextérité. Les sacs vitaux sont déposés, désormais  le retour en arrière est impossible, des gouttes de sueurs perlent sur nos tempes.

Rien n’a été laissé au hasard, matériel Shimano de compétition, gels,  manchons de compressions. Les  temps de passages,  le profil, les cartes, les pièges, et le plan de nutrition sont mémorisés dans nos cerveaux suroxygénés, la peur transpire de nos collants.

Dehors la tension est déjà palpable. Le vent balaye les rues désertes de la station silencieuse. Un chat noir passe. Un volet claque.  Fébrile, j’hésite à sortir un gel.

Pour conjurer le mauvais sort, nous dégustons une bière accompagnée de biscuits salés au saloon du coin.  La suite, une pizza et une nuit  profonde qui renforcerons nos âmes d’ultra sportifs.

Le grand jour, Arnaud, clame le départ, les pèlerins ont déjà sorti leurs bâtons.

La première descente permet de me rassurer sur mon potentiel musculaire. 

Au col de Cluy, la pluie tropicale coule sur mes muscles en feu, des volutes de vapeur se dégagent autour de ma silhouette.

Besse, mon plan se déroule sans accros. La Mexicaine fonctionne t’elle donc vraiment ? La prophétie est en route.

Emparis, mes pieds creusent des tranchés dans la terre humide et meuble du plateau

Au Chazelet, Eric Thunder Bonnotte se met en marche, rien ne pourra plus l’arrêter.
Il semble voler ses pieds ne touchent plus le sol, est-il humain ?

La Grave,  je retrouve  Seb (Louvet), nos énergie sont en phases,  le pacte des Loups des Écrins est signé.
Arsine, Casset, Monétier, une formalité, nous capitalisons nos forces corporelles et spirituelles.

Col de l’Eychauda, nous contenons toujours notre véhémence, nous connaissons parfaitement les difficultés de ce parcours de titan. Néanmoins nous nous faisons de moins en  moins volubiles.

La belle descente vers Chambran est avalée avec délectation. La suite est moins savoureuse.
A Vallouise, Arnaud et son équipe s’occupent de mes pieds à moitié moisies par l’humidité.
La journée touche à sa fin. Nous passons en mode furtif, nom de code Black Night.  Je branche mon sonar. A Entre-les-Aygues notre puissance mentale et physique s’essouffle pernicieusement.

La route vers le col l’Aup Martin sera notre chemin de Croix. Nous nous faisons déposer par les deux Golgots belges Bernard et Renaud,  leur puissance me conforte dans l’intérêt du régime coquillages-céréales-pomme de terre, diététique futuriste ?

La descente vers le Refuge du Pré de la Chaumette sera notre calvaire, mon esprit veut s’échapper de mon corps, le Malin a déjà pris en étau mes quadriceps qui pleurent leur race.

Au cœur de la nuit nos yeux ont du mal à resté ouvert malgré notre vitesse ascensionnelle improbable.
Les 3 cols s’enchainent  passablement, je commence à douter de ma méthode d’entrainement, mes quadris aussi.

Le jour se lève, nous descendons à corps perdu vers la Chapelle, malgré notre préparation mentale notre motivation est en berne.

Retour à la civilisation,  sur la route,  courageusement nous essayons de courir, manifestement notre opiniâtré n’y fera rien.  Est-ce la banqueroute, pire l’abandon? 

Sur le bord de la route l’ami Chocapic me salue. Il devine la vulnérabilité et le désarroi sur mon visage.  Fixement, il m’encourage comme il se doit.

L’arrivée dans la Chapelle sonne comme un requiem. Seb est décidé, la mort dans l’âme, il dépose son dossard. Notre voyage commun s’arrête là, cela restera l’un des souvenirs les plus fort de cette aventure.


"Chuck Norris n’abandonne jamais, c’est la course qui abandonne"


"Rémy Marcel n’abandonne jamais, plutôt vomir dix fois que d’abandonner"

Speedy Damien et Wonder Caro unissent leur Spirit Power, leur puissance thaumaturgique m’envahit littéralement. Je vais faire une sieste.

J’invoque Richnou et Skippy, puissent-ils me redonner des pieds et le fighting power.
Je repars avec ardeur.  Je me transcende, et calque ma foulée sur celle de Caro la gazelle.

Le refuge des Souffles est méthodiquement rejoint, une pause et de l’eau me permettent de recharger mon flux thermodynamique. 

C’est maintenant seul dans cette montagne qui je progresse. La nature veut communiquer avec mon esprit,  ruisseaux, dalles, rochers, fleurs, arbres, insectes,  je m’enrichis  de chaque rencontre. Je me sens vaillant.

Méditation Énergisante photos : http://lamiricore.fr/
Quelques mètres avant la Vaurze, alors que je suis en pleine méditation énergisante, je retrouve l’ami Benco et son ami Nesquik, ils décident  chaleureusement de m’accompagner jusqu’au col. Leurs encouragements spirituels me suivront jusqu’à la fin. Ils poursuivent leur aventure et disparaissent dans la brume tels deux condors majestueux.
Le soleil chauffe pour la première fois mon visage salé,  mes jambes s’adaptent et encaissent la longue descente vers le Désert.
Avec surprise  j’aperçois mon ami Vince, le pacer de Jeff qui a abandonné à cause de ses  pieds en putréfaction et de son angoisse de la nuit froide et obscure.

A Côte Belle, sous le déluge, nous grimpons à bonne allure, derrière Arnaud le Viking est sur le point de nous rattraper, le salopard il doit grimper à plus de 800m/h. Vince fier et conquérant ne lâche pas et me tire sur le sentier de boue. Nous basculons vers Valsenestre toujours en état de contrôle spiritique méditatoire.

Nous glissons avec vélocité le long des lacets savonneux. A Valsenestre je retrouve mes deux Princesses et mes amis. Deux belles diablesses me  prodiguent  un massage  à vous réveiller les chakras.
Deux tours de cadran et une horde de coureurs plus tard, je reprends la route de la Muzelle.

Au col, la horde de valeureux est désormais derrière, nous allumons nos phares,  dans le brouillard j’azimute plein nord, les pierres et la neige fondent sous mes pas cadencés.

Sur les derniers mètres de la descente,  ma détermination s’évapore et mes cuisses transformées en marbre antique ne réagissent plus aux sollicitations psychiques.
C'est alors que je conjure les esprits de la forêt, rien n’y fera,  ni les trolls et ni les lutins.

Visite de Vénosc la Belle, nous nous engageons dans l’ultime grimpée. Les souvenirs se bousculent, mes bras frêles poussent sur mes bâtons écaillés et tordus.  

La lumière urbaine m’illumine enfin, le silence s’installe, je me transporte jusqu’à l’arrivée, Arnaud et Jeff m’accueillent joyeusement malgré l’heure indécente. Sous l’arche, j’embrasse mes camarades avec une émotion partagée.